m u l t i p l e s

(Cinéma) Pédagogie du montage DANEY/GODARD


Pédagogie du montage Daney/Godard

 

 

ENTRETIEN DANEY / GODARD

Merci à Frédéric Sabouraud, Serge Le Peron, Cécile Sorin

Séance présentée par Ariel Schweitzer et Serge Le Peron

Dans le cadre de la journée d'étude Pédagogie de la critique organisée par Christian Delage, Frédéric Sabouraud, Cécile Sorin, Eugénie Zvonkine

24 et 25 mars 2014

Semaine des arts de l’Université Paris 8

 

 

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Pédagogie du montage

 

 

Entretiens Daney/Godard

D’abord l’image, le cadre

Choisi par Godard

Le cadre comme une démonstration du montage en acte

Montage dans le cadre, à l’intérieur de la profondeur de champ

Une leçon

 

 

Godard au premier plan, bord gauche du cadre, comme s’il tenait littéralement le bord gauche de l’image, légèrement coupé d’ailleurs, toujours de profil.

Daney au second plan, de face, les mains éclairées par la lampe du bureau

Dans la perspective et dans le cadre, Godard donne l’illusion de surplomber Daney tout en composant l’un des bords du cadre

Godard fumant son cigare (ce qui donne lieu à de nombreux moments où Godard, même sans parler, fonctionne comme un obturateur dans l’image, cachant Daney, manière d’interrompre visuellement un fil qui se continue en arrière plan sonore)

La fumée du cigare qui fonctionne comme un voile/un cache également

Daney fumant ses cigarettes.

 

 

Magnifique, la flamme noire de leurs briquets : noire car moirée, creusée, par la mauvaise qualité de l’image vidéo. Les stylos sur le bureau tremblent et bavent aussi.

 

 

Composition interne du cadre et recadrage

Car ce n’est pas fini

Il y a dans le fond du cadre deux écrans

Une télévision qui déverse (vomit ?) en boucle ses émissions, séries, clips

Et une fenêtre, obturée par un rideau/voile, derrière laquelle le jour se couche

Mouvement, comme il a été dit hier lors de la projection, vers le crépuscule

En continu/discontinu de la parole (car il y a les coupes des bobines tout de même)

 

 

Deux fenêtres et deux penseurs : Godard dont le visage se découpe sur l’écran de télévision (télévision dont Godard et Daney ne cessent de parler, elle est là, dans le cadre, et on ne sait plus qui observe qui, est-ce une autre caméra en contrepoint de celle composée par Godard ?), et Daney dont l’épaule gauche se découpe sur une fenêtre.

Pas besoin d’y revenir : la fenêtre c’est la peinture, le cinéma et (puisqu’elle est là) la télévision. Il y a d’ailleurs une image en noir et blanc (dessin, photo ?) exactement entre la télévision et la fenêtre. On aimerait savoir quelle est cette image.

 

Donc du montage en acte, dans l’espace, dans la profondeur de champ

Deux flux de voix qui s’affrontent, s’opposent, deux rythmes : le fil contre la coupe

Le fil de Daney qu’il mettra tout l’entretien à réussir, à un moment magique, à se dérouler

(Cette phrase magnifique à un moment où il ne parle plus depuis longtemps : « j’ai perdu le fil »)

 

Car, avant cela, sans cesse interrompu, coupé, par la coupe/Godard

Montage en acte et en parole, dans la profondeur de champ car lorsque Godard parle, à la lettre, il coupe la parole de Daney (si l’on considère, ce qui est faux, que la voix vient vers nous et que nous sommes virtuellement à la place de la caméra), il interrompt le fil, le flux de pensée et vient y insérer parfois un mot, parfois même pas un mot, souvent des phrases comme venues d’ailleurs, n’ayant aucun lien direct avec le fil de Daney. Montage godardien en acte : on coupe ou colle, on déplace et on télescope, on rapproche.

 

 

Entretien comme dans une salle de montage, de montage des pensées

Deux flux de pensée qui se rencontrent

Deux tons de voix aussi, magnifique tessiture de Daney, qui nous berce,

Et tessiture rocailleuse, enfantine, de Godard, qui joue/creuse

 

 

Face contre profil

Godard en position de monteur interne au plan

Daney construisant, déroulant, cherchant son fil

 

 

Pensée linéaire du non linéaire (Daney)

Pensée non linéaire du linéaire (Godard)

 

 

Ce rendre compte que tout cela, tout ce que leurs mots projettent,

Est déjà presque complètement contenu dans l’image

Le cadre

Le montage interne au cadre

Il suffirait alors que l’image grise derrière soit une image des camps

Et alors l’image contiendrait le propos au sens d’un dédoublement parfait

 

Docteur Godard et Mister Daney

 

 

Nicolas Droin

25/03/2014

 

 

 

 

 

 

 


25/03/2014