ERASE
Un film de Nicolas Droin
Avec Junior Ngolongolo et Agathe Bourgeois
10min
2024
SYNOPSIS
Un jeune homme trompe son ennui en bravant chaque nuit le couvre-feu et en dessinant sur les murs. Malgré les interdictions, il sort la nuit pour laisser un trait, une ligne, une couleur sur les murs de son enfermement. Un jour, quelqu’un.e semble «répondre» à son dessin par un autre dessin…
INTENTIONS
Erase s’est réalisé comme un geste, nécessaire, vital.
J’ai écrit ce film avec le désir de tourner de nouveau, de sortir dans les rues avec une caméra.
Suite aux confinements beaucoup de choses ont bougé dans nos têtes, dans nos vies intimes, dans la société en général. Comme d’autres, il nous arrivait de sortir la nuit, malgré les interdictions. C’était une période étrange. Il y avait aussi cette sensation de redécouvrir les lieux, vides et désaffectés des présences humaines. Comme un monde d’après l’homme.
Les murs d’une ville sont un espace d’expression, de projection de nos luttes ou de nos vies.
Ce sont des traces concrètes de nos espoirs ou de nos pensées qui s’y inscrivent. L’effacement des tags, graffs ou écritures sur les murs laisse souvent une trace : un carré, ou rectangle, d’une autre couleur que le mur, qui indique la présence d’une inscription que l’on a voulu cacher.
Cette stratégie d’effacement, de plus en plus rapide et courante, dénote une volonté qui me semble plus large et profondément politique, de ne pas laisser cet espace à la libre expression de nos révoltes.
À l’origine du film il y a tout d’abord un travail photographique dans la ville que je réalise depuis quelques années : une forme d’exploration ou de dérive dans les rues, sans trajet préalable, durant lesquelles je photographie les détails, murs, lumières ou motifs qui retiennent mon regard.
Cette pratique photographique solitaire a conditionné la volonté de faire un film en équipe réduite, avec un dispositif filmique léger, pour rester au plus proche de cette captation documentaire et poétique des lieux urbains. Le film est tourné à Montreuil, ville où je réside depuis quelques années et qui m’inspire par la diversité de ses habitants, de ses rues et de ses ambiances.
Le personnage du film (Junior Ngolongolo) dessine avec des craies de couleur des dessins simples, naïfs, entre le figuratif et le signe abstrait. Ses messages ne sont pas politiques mais son geste l’est. Il s’agit de sortir, de laisser une trace. Je voulais témoigner d’une forme de retour à l’enfance qui, quelque part, en chacun de nous, résiste.
Dans le film, se constitue une forme de langage non verbal (et non symbolique) entre Junior et Agathe : simplement un jeu de reprise ou de réponse d’un dessin à l’autre. Le film questionne la solitude, espace où on se retrouve et où parfois on perd pied. Junior pourrait sombrer dans le ressentiment, mais il reste à la limite. Pourtant la violence de ce monde brûle en lui. Il s’imagine ou découvre alors un alter-ego au féminin. Il ne s’agit pas d’un fantasme : elle existe.
Ils ne se rencontrent pas mais ils se répondent. Un dialogue silencieux commence : qui est-elle, elle, de l’autre côté ?
La jeune fille (Agathe Bourgeois) est seule elle aussi, même si elle suit les traces de Junior et si elle s’imagine le connaître. L’idée était de faire ressentir combien la solitude est universelle.
Dans Erase, la voix-off a été écrite sous forme épistolaire. Le temps même de la voix off implique un après-coup, une réminiscence. Il ne s’agit pas d’expliquer mais de parler à distance à l’autre : cet autre inaccessible et invisible mais dont on sent la présence. Le fait de suivre la fille à la fin du film ouvre à un autre regard, un autre film possible, une brèche dans le réel.
Une part d’onirisme apparait dans les visions de J.. Je voulais montrer comment l’obsession mène au doute, à une forme de légère folie, de décalage par rapport au réel. J’aime beaucoup les ouvrages d’Haruki Murakami, sa manière de mêler des récits réalistes avec une forme d’onirisme. La solitude exacerbe les tensions et est génératrice de hantises, de peurs. J’aime quand le cinéma se situe sur cette frontière, fine, entre le réel et la fiction.
ERASE
Format tournage : Numérique 6K Raw
Format de diffusion : DCP - 4K - 1.85 - 5.1
Durée : 19 minutes
ÉQUIPE TECHNIQUE
Nicolas DROIN scénario et réalisation
Océane FARNOUX assistante à la réalisation
Lionel RIGAL, Christophe FRESSARD chefs opérateurs
Jérôme HARRE ingénieur du son
Océane FARNOUX régie générale
Bertille AJELLO régisseur adjoint
Manon LE GAL maquilleuse SFX
Nicolas DROIN montage
COMÉDIENS
Junior NGOLONGOLO
Agathe BOURGEOIS
REMERCIEMENTS
La Mairie de Montreuil
La Babcockerie / Namasté
Le Bistrot du Marché
Poissonnerie 2M